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Joan Paulin (Mississauga, Ontario) est la mère dévouée d’une jeune femme de 24 ans atteinte d’hypertension pulmonaire. Fidèle alliée de la communauté de l’HTP et, depuis peu, ambassadrice de l’AHTP Canada, Joan joue le rôle vital de personne-ressource pour ceux et celles qui reçoivent un diagnostic d’HTP. Elle milite pour que les personnes atteintes aient accès aux traitements dont elles ont besoin, un combat qu’elle n’est pas près de laisser tomber. Nous avons donc envoyé Joan en mission à la conférence 2017 de l’Organisation canadienne des maladies rares, à Toronto, le mois dernier, pour représenter la communauté de l’HTP. Voici son compte rendu.
 
Avertissement : Les points de vue et opinions exprimés dans cet article sont ceux de l’autrice et ne reflètent pas nécessairement la politique ou le point de vue officiel de l’AHTP Canada.

Saviez-vous qu’au Canada, une personne sur douze souffre d’une maladie rare, soit près de trois millions de Canadiens et de Canadiennes (sans compter leurs proches)?
J’ai pu en apprendre davantage sur ces données – et à propos d’une foule d’autres sujets – lors de la conférence 2017 de l’Organisation canadienne des maladies rares, qui s’est tenue à Toronto le mois dernier. La conférence, qui s’intitulait « Delivering Innovation: A Moon Shot for Rare Disorders - and Beyond », avait pour thème l’innovation.

L’événement était présenté comme une occasion pour toutes les communautés réunies autour des maladies rares de mieux connaître ce que les professionnels de la santé entrevoient pour l’avenir sur les plans de la recherche, de la défense des droits des personnes atteintes et de l’accès aux traitements. Médecins, chercheurs, personnes atteintes, représentants des gouvernements provincial et fédéral... les conférenciers représentaient des facettes très variées du milieu de la santé, mais en fin de compte, tout le monde s’est mobilisé autour d’une visée commune : développer le modèle « le mieux adapté qui soit » pour le réseau canadien des maladies rares.

Je dois admettre que certaines interventions utopiques, mais quand on parle d’innovation, je suppose que c’est une bonne chose de viser haut!

Voici donc un résumé de ce que j’ai appris. Je tiens à dire d’entrée de jeu que si je simplifie beaucoup, c’est que dans le contexte, je crois qu’il faut dire les choses simplement.

Dans son état actuel, le système de santé (de la recherche à l’accès aux traitements) repose sur ce qu’on appelle le modèle de la « maladie commune ». De vastes essais cliniques sont réalisés sur d’imposants groupes de patients au moyen d’outils qui facilitent un diagnostic précoce et la prestation rapide du traitement visé. Le traitement en question devient ensuite facile d’accès, et peut être prescrit par les médecins à un coût relativement bas (car il est nécessaire à beaucoup plus de personnes que les traitements destinés à une maladie rare comme l’HTP).

Dans le cas des maladies rares, ce processus est très, très différent. Les essais cliniques comptent très peu de patients... parce que les maladies sont rares, justement. Établir le bon diagnostic, dans la plupart des cas, peut prendre des années (4,8 ans en moyenne!). Puis, les personnes atteintes ont généralement besoin d’un suivi auprès de multiples médecins spécialistes et de traitements susceptibles de coûter très cher (en particulier pour certaines maladies ultrarares). En conséquence, pour ces personnes, avoir accès aux traitements qui pourraient leur sauver la vie est, en soi, un défi (je ne vous apprends rien).

Comment certaines de ces questions ont-elles été abordées lors de la conférence?

Le 29 février 2016 – Journée des maladies rares –, le ministère de la Santé et des Soins de longue durée de l’Ontario a créé un groupe de travail sur les maladies rares pour cibler des moyens de mieux gérer le traitement des maladies rares, notamment en renforçant les méthodes de diagnostic et les soins. Le coprésident du groupe de travail, le Dr Ronald Cohn, a profité de la Conférence pour faire un bilan des progrès de son équipe. Très enthousiasmant...

Tout particulièrement, le Dr Cohn a annoncé que le groupe de travail avait remis un rapport au ministère en septembre. Il s’est dit très optimiste quant à la mise en œuvre des recommandations.

Parmi les nombreux éléments d’information qu’il avait à partager, voici ceux qui ont attiré mon attention :

Les voix et les histoires des personnes atteintes sont importantes et continueront de l’être, surtout dans les communautés réunies autour des maladies rares, où il n’y a pas deux histoires identiques.
Bien que les personnes atteintes d’une maladie rare aient besoin de soins normalisés, ils ont également besoin de souplesse, car un médicament peut ne pas fonctionner de la même manière pour tout le monde. (Mention spéciale pour la thérapie double ou combinée!)
Nous devons prendre du recul par rapport au modèle de la « maladie commune » : l’expérience du monde réel doit être prise en compte quand on cherche à déterminer quel médicament répond aux besoins d’un patient. (Une autre mention spéciale pour les défenseurs des intérêts des personnes atteintes d’HTP qui luttent avec une détermination inébranlable pour que les médecins spécialisés dans l’HTP soient ceux qui prennent les décisions quand il s’agit de prescrire un médicament.)
En médecine, la tendance d’avenir n’est plus au prêt-à-soigner. Au contraire, d’après les avancées en immunothérapie et en thérapie par les cellules souches, les soins de santé évoluent vers une prestation personnalisée. À vrai dire, les communautés réunies autour des maladies rares ont la chance, pour une fois, d’être les chefs de file d’une approche personnalisée des soins, et ce, au nom de tout le milieu des soins de santé.
Il y a moins de lacunes dans les données de recherche et dans nos connaissances qu’on le croyait au départ. Cela dit, une approche concertée s’impose pour combler les lacunes qui demeurent. Marshall Summer, de la National Organization for Rare Disorders, aux États-Unis, a souligné dès le premier jour la nécessité de créer des plates-formes efficaces recensant les personnes atteintes.
Tout au long du week-end, ces réflexions et ces préoccupations ont également été exprimées dans les panels. À plusieurs reprises, il a été question du besoin d’une confirmation plus rapide des diagnostics, de l’importance de la personnalisation des soins et d’un système de santé qui s’engage à éliminer le travail gouvernemental en vase clos que ce soit au stade de l’approbation, de l’accès ou du financement.

Ces discussions portaient toutes sur le traitement des maladies rares, mais je ne pouvais pas m’empêcher de penser qu’elles auraient très bien pu s’appliquer à tous les soins de santé fournis au Canada. Voilà peut-être une clé. L’ensemble du système de santé a besoin d’une mise à niveau digne du 21e siècle. Et ce dont je suis certaine, c’est que grâce aux pressions exercées par les nombreuses communautés réunies autour de maladies rares (y compris l’AHTP Canada, les personnes atteintes/militantes et l’Organisation canadienne des maladies rares), la cause des maladies rares prend de l’ampleur au pays.

En guise de conclusion, je voudrais remercier chaleureusement la communauté de l’HTP. En écoutant les conférenciers parler du manque de défenseurs des intérêts des personnes atteintes et de la pénurie de spécialistes pour de nombreuses maladies rares, j’ai compris que je tiens peut-être notre propre communauté pour acquise. Il est essentiel que nous continuions de militer pour qu’une approche normalisée mais souple des traitements soit préconisée, pour que ce soit les médecins qui prescrivent les soins et pour que les nouvelles thérapies soient plus faciles d’accès. La communauté de l’HTP a une longueur d’avance, travaillons ensemble à rester en tête!
Joan Paulin

Joan Paulin